Nous réussissons donc à rentrer en contact avec le marchand de bestiaux, qui nous avait heureusement donné ses coordonnées lors de l’achat.
Il semble compréhensif, il parle français, il viendra ce soir à l’hôtel, nous propose-t-il.
Dans le petit salon de l’hôtel, nous commandons un thé la menthe.
Ahmed, le marchand de bestiaux, est un homme avec une grande barbe, une djellaba, et un petit chapeau rond sur l’arrière de son crâne, il a toute l’apparence d’un musulman pratiquant, inspirant le respect.
Son français, à notre bonne surprise, est plutôt bon, et son instruction intéressante.
Il nous raconte avoir voyagé, en Europe, et nous tient un discours philosophique sur la situation des marocains du Maroc, il ose nous parler du Roi, de la politique menée ici, telle une dictature et d’autres sujets…
Nous regagnons un tant soit peu une confiance perdue…c’est une personne intelligente, qui nous dit que de part sa religion, il se doit de nous aider, de régler notre problème, qu’il se repent de nous avoir mis dans cette situation, et veut nous en sortir.
Nous comprenons donc à ce moment qu’il n’est pas seul à avoir vendu l’animal, ils nous ont vu venir « gros comme une maison » comme on dit, il n’y avait pas un intermédiaire, mais deux, le soudeur, qui nous a accompagnés et le frère du soudeur, qui était sur place au souk le matin de l’achat de la mule.
Ahmed était certainement dans le coup, mais apparemment, il s’en veut, il a eu des remords de nous avoir arnaqué…nous ne comprenons pour l’instant pas tout!…
En tous les cas, il est là ce soir et veut nous aider, c’est l’essentiel pour nous…
« Il va falloir être rusés, c’est ainsi que nous y arriverons… »nous explique-t-il.
Il sait comment fonctionnent les gens ici.
« Ma sœur travaille à la police judiciaire, vous pouvez allez vérifier, nous dit il peut être nous nous donner confiance en lui.
Il faut leur faire peur et leur dire que vous êtes allés à la police.
J’en fais mon affaire.
Venez chez moi demain, nous mangerons le couscous ensemble et discuterons. »
Le lendemain c’est chose faite, le couscous est bon dans une maison simple dénuée de tout artifice ou de quelque décoration que se soit…
mais les choses n’évoluent pas trop, nous avons du mal à croire, à ce moment, que ça va s’arranger.
Ce qui nous importe, c’est d’avoir une mule correcte, une bête douce et sociable, mais Ahmed nous dit d’être patients, qu’il va régler un problème à la fois.
Patience, patience, c’est difficile, dans cette ville où nous n’avons rien à faire pour passer le temps.
Il viendra nous voir ce soir à l’hôtel.
Le soir venu,
Rien de neuf, il prend les choses en main et nous demande de ne pas venir au souk demain, qu’il en fait son affaire et que notre présence là bas pourrait perturber les plans…
Samedi
Notre impatience nous donne mal au ventre,
10 heures, Ahmed n’appelle pas,
11 heures, Ahmed n’appelle pas, nous tentons de le joindre, répondeur…
Répondeur, une fois, répondeur deux fois, répondeur trois fois….
Nous perdons confiance!
Midi arrive,
pas de nouvelles…
Dans notre chambre d’hôtel, le temps devient long, que faire ? sinon attendre encore, nous sommes maintenant impuissants devant cette situation.
Midi et demi,
je propose d’aller en bas boire un thé, histoire de nous faire tenir encore quelques minutes…
Nous descendons
et là, nous apercevons le soudeur, puis son frère, puis Ahmed qui arrivent.
Nous montons tous dans une salle plus éloignée des regards…
Ahmed a mené son plan à bien, les arnaqueurs ont mordu à l’hameçon, ils ont pris peur des menaces d’appeler la police, c’était le frère du soudeur qui avait empoché l’argent.
Il nous rembourse 11500 dirhams (il garde 500 pour les frais) n’a pas l’air content.
Mais Ahmed s’est plutôt pas mal débrouillé…
Nous voilà plus riches à nouveau, mais n’avons plus de mule…
Nous étions loin d’imaginer un tel pas en arrière!…
…En arrière, ou en avant ?
Allons nous parvenir à trouver une mule maintenant ?
Le souk du samedi est passé…
Pourvu qu’’Ahmed ne nous lâche pas…
Prendre encore notre mal en patience, est une belle épreuve, nous qui avons tant l’habitude que tout aille vite en France…